Tonio jardinait. Et comme à chaque fois qu'il jardinait, il avait mis son casque sur ses oreilles à un volume si élevé qu'il aurait cassé les tympas à n'importe quel individu du genre humain ou qui tenait encore à son ouïe. Mais Tonio s'en fichait, c'était comme ça qu'il l'avait toujours écouté et ça l'aidait à bien faire le vide dans son esprit, déjà bien trop perturbé en ce moment même. Oui jardiner l'aidait à se vider l'esprit, et c'était aussi pourquoi il était seul dans cette serre. Et c'est pourquoi il s'autorisait un son au élevé, assez pour qu'il en ait le cerveau secoué.

Mais ça il s'en fichait. Vraiment. C'était vraiment la chose à laquelle il pensait le moins à cet instant précis. Oui il avait l'esprit ailleurs, bien ailleurs. A se douter si il était encore dans son corps. Oui car la chose qui avait envahi son enveloppe charnelle à cet instant précis c'était le feu. Et il l'avait aux hanches surtout. Il avait la bougeotte, le faisant faire des swings des hanches, d'avant en arrière et une danse du ventre improvisée. Qu'est-ce qu'il s'amusait, oh oui vraiment. Et personne à cette heure si tardive n'aurait pu le déranger.

C'est donc en même temps que sa danse nuptiale envers ses pauvres plantes innocentes qu'il était entrain de secouer son tuyau d'arrosage. Et quand je dis toyau d'arrosage je parle du toyau d'arrosage pour arroser les plantes pas le "toyau d'arrosage" avec les guillemets. Non non vraiment il faut s'enlever cette idée de la tête, bande de pervers.

Bref il était occupé à arroser ses petites plantes, quand soudain il s'écria:

-"Everybody dance now!"

Autant la danse qu'il effectuait depuis tout à l'heure ne rimait à rien mais dès la première note de cette fameuse musique moldue, c'était devenu une gesticulation ridicule.

Tonio, oooh Tonio...

Est-ce que j'ai déjà précisé combien il avait le don d'écouter sa musique jusqu'à de devenir sourd?Oh que oui. Autant il ne pouvait n'entendre que sa musique et surtout pas le bazars qui se tramait dans la serre d'à-côté?Se doutait-il au moins que son beau-père était entrain de se faire avaler vivant par une plante en hurlant bon nombre d'injures en allemand, si ce n'est toutes. Oh non il n'en avait aucune idée. C'était triste une telle fin pour l'allemand et l'espagnol aurait certainement sa mort sur sa conscience...mais c'était ainsi.

Ou peut être pas d'ailleurs. Paella, elle avait vu toute la scène se dérouler devant ses yeux, bien nichée dans la touffe qui servait de cheveux au brun. "Ce que les humains peuvent être bêtes des fois." pensa t-elle presque tout fort si elle avait été dans la capacité de parler. Entre l'espagnol qui effectuait une parade nuptiale des plus douteuses et le professeur d'Histoire de la Magie qui était entrain de se faire engloutir par une plante, elle ne pouvait que avoir pitié d'eux.

Si ils continuaient dans la même lancée, Ulrich allait finir par mourir étouffé alors qu'Antonio aurait simplement pu le sauver si il avait été un peu plus attentif. Et autant dire qu'il aurait certainement fini dans le livre des morts les plus ridicules du siècle à ce stade là et l'espagnol en prison pour "non-assistance à personne en danger". Et autant que la tortue savait, elle voulait que son maître soit apte à continuer à la nourrir et lui donner tout l'amour et la tendresse dont elle avait besoin.

C'est avec cette résolution qu'elle attrapa une large poignée de cheveux entre son bec et tira violemment dessus, jusqu'à presque les arracher. Cela eu l'effet d'une bombe sur le pauvre sorcier qui fit un bond pas possible en jetant son tuyau d'arrosage et son casque en l'air.

-AIE AIE AIE AIE- PAELLA !!

La petite tortue lâcha la poignée de cheveux après que son maître eut finalement l'air de réagir et se recala correctement pour vite se rendormir. Elle avait fait son bon geste de la journée et elle était contente. Elle pouvait donc se poser un instant, comme toutes les tortues normales le feraient.

Antonio lui se remettait du choc doucement en ramassant son casque et en éteignant le courant d'eau dans son tuyau d'arrosage. Il aurait voulu punir sa tortue pour ça, mais en se rendant compte qu'elle s'était endormie, il préféra reporter ça à plus tard. Mais ce ne fut pas la seule chose dont il se rendit compte. Il entendit des insultes et des jurons en allemand d'une voix grave et roque qu'il n'avait pas l'habitude d'entendre crier ; Ulrich. Il tourna vivement son regard dans la direction des cris pour s'apercevoir que dans la serre d'à-côté se trouvait son beau-père, piégé dans les feuillages d'une plante. La pupille de ses yeux s'agrandit à cette vision et aussi tôt il tapa un sprint pour sortir de la serre et aller dans celle d'à-côté. Il rejoignit bien vite Ulrich l'air tout aussi affolé que lui et hurla par dessus ces cris :

-JE SUIS LA SEÑOR BEILSCHMIDT, NE VOUS INQUIETEZ PLUS ! J'AI LA SITUATION EN MAIN !

Il s'arrêta à quelques mètres de lui pour observer la scène. Son cerveau n'avait peut être jamais tourné aussi vite. Il devait agir et vite mais avant tout geste imprudent qui aurait pu coûter la vie de son professeur d'Histoire de la Magie, il devait identifier l'espèce de la plante.

Des longues plantes, qui engloutit les gens au fur et à mesure de leurs mouvements, avec cette aspect de pieuvre végétale...Mais oui c'était pourtant très clair!Il faisait bel et bien face à un Filet du Diable, redoutable plante qui, si ses caractéristiques ne sont pas connues, peuvent coûter la vie.

-Señor Beilschmidt, arrêtez de bouger immédiatement et fermez les yeux!

Il sortit sa baguette à ses paroles et la pointa sur le blond.

« Je m'en remet à vous … Antonio Fernandez Carriedo ... »

C'est toujours sa baguette pointé sur Ulrich et la plante qui le retenait prisonnier qu'il fixait la scène bien décidé. Il répètait son sort une dernière fois dans sa tête, histoire de pas se tromper au dernier moment avant de pousser d'une voix forte et pleine de fierté :

-Lumos !

Et c'est à ces mots que le bout de sa baguette s'illumina d'une  faible lumière blanche. L'effet était beaucoup moins cool qu'il l'avait imaginé et malgré que le Filet du Diable soit une plante qui haïsse la lumière, le peu de lumière qui émergeait de sa baguette ne fit que frétiller cette dernière. Il fronça les sourcils et prit une grande inspiration. Il lui fallait plus d'intensité, plus de puissance. Alors il faiblit pas, toujours sa baguette bien tendue, pointée sur le professeur d'Histoire de la Magie et la plante et s'écrie, un peu plus fort que la première fois :

-Lumos maxima !

Et alors le rayon de lumière devint tout à coup plus fort, la lumière devenant presque aveuglante, même pour l'espagnol. Le bras toujours bien tendu, il se cache les yeux de ses bras, incapable de garder les yeux. Mais il entendait très bien la plante geindre devant tant de lumière qui devait lui être horriblement douloureuse. Après de longues secondes, il fit s'éteindre la baguette pour la ranger dans sa poche et se rua sur son beau-père pour l'aider à se redresser.

-Vous allez bien Señor Beilschmidt?Vous n'avez rien? déclara t-il en l'aidant à se relever en lui servant de canne.

Il détaillait le grand homme blond avec son grand sourire rassurant et plein de bonne volonté.